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On en parle

Territoires Singuliers – De Pierre Bettencourt à Josette Rispail

Christian Noorbergen, le 15 janvier 2021

La Galerie Les Yeux Fertiles, très grande galerie quasiment unique en France, créée en 2001, expose les artistes du surréalisme international (de Hans Bellmer à André Masson), certains créateurs en marge du surréalisme (d’Erro à Leonor Fini…), et les grands noms de ceux qui explorent les méandres de l’inconscient proches de l’Art Brut, de l’Art Visionnaire, ou de l’Art Singulier,.

Jusqu’au 30 janvier, et peut-être au-delà, cinq créateurs plus qu’étonnants occupent les cimaises. Espace prodigieusement habité, dense et poignant, avec Pierre Bettencourt, Chomo, Yolande Fièvre, Louis Pons, et Josette Rispal. 

Louis Pons – Têtes

Louis Pons est un barbare du regard, un sauvage égaré dans les marges de la modernité. Un saint homme, un tantinet particulier aux yeux couleur de poix, un mystique à l’odeur de soufre qui ne vivrait que dans les greniers et les caves, en ignorant avec superbe l’existence des salons. Sans dogme et sans théologie, l’art de Pons est rural et médiéval, avec des relents momifiés d’ornière oubliée, de sorcellerie et de magie dangereuse. Cependant, la poussière s’est accumulée et la nostalgie a perdu ses douleurs. Les œuvres de Pons ont d’emblée la couleur du temps…

L’extraordinaire présence des images bettencouriennes naît d’une muralité prodigieuse, omniprésente et verticale. On voit des corps terribles, faits de terre et de roc, d’os, d’œuf et d’éponge, tous statufiés par la puissance amplifiée des matières d’origine, laissées quasi intactes. Bettencourt n’a jamais fumé l’opium de la communication. Il a quitté depuis longtemps les surfaces fatiguées de la modernité pour hanter le monde totémique de ses succulents fétiches, qu’il nourrit tous les jours de ses mythes cruels, désencombrés et désossés. 

Pierre Bettencourt – L’homme du troisième jour – 1968 – 1453x15x12 cm

Une puissance magique s’étend, car Bettencourt s’est abreuvé aux sources syncrétiques des plus vastes cultures. Il a cimenté à vif des éléments d’art arrachés aux mythologies disparues, ou par lui réinventées. Puis, par le cru et le nu, avec la minutie d’un sorcier halluciné, il a réinventé à son usage les rites et les affres du désir.

Chomo – Sans titre – Bois – 1974 – 87x35x26 cm

Chomo, né Roger Chomeaux, disparu en 1999, a fait de son antre, à Achères-la-Forêt, un très marginal lieu de visite. Yolande Fièvre crée de somptueux reliefs fantastiques et lunaires, tandis que Josette Rispal transforme le monde en cartographies enchantées.

Josette Rispal – La gaîté lyrique – 136×95 cm

Jusqu’au 30 janvier 2021
Galerie Les Yeux Fertiles – Paris 6ème