< retour aux Articles
On en parle

Silence et résonance – Hans op de Beeck et les maîtres flamands

Chantal Vérin, le 28 avril 2023

Cassel, joli bourg en Flandre, entre Lille et Dunkerque, a connu depuis l’époque romaine une histoire agitée. A maintes reprises attaquée, conquise, incendiée, convoitée par les rois de France et d’Espagne, elle est devenue française en 1678 par le traité de Nimègue.
Dans cette région dotée de nombreux établissements culturels (Musée Matisse au Cateau-Cambrésis, MusVerre à Sars-Poterie, Maison de Marguerite Yourcenar…), le Musée de Flandre de Cassel, installé à l’Hôtel de la Noble-Cour, fleuron de l’architecture civile flamande, a l’ambition de montrer la diversité et la richesse de l’art flamand du XVème siècle à nos jours.

Vingt tableaux attribués aux grands noms de la peinture flamande (Bosch, Brueghel, Rubens) ont récemment enrichi les collections. Cécile Laffon, nouvellement nommée à la direction du Musée, a dû repenser le parcours permanent, et poursuivant la tradition du lieu de mettre en regard arts ancien et contemporain, elle a invité l’artiste belge pluridisciplinaire Hans Op de Beeck, à la fois plasticien, sculpteur, vidéaste et metteur en scène. “Silence et Résonance”, l’exposition dont Cécile Laffon est commissaire, propose une déambulation, voire un dialogue, par filiation ou opposition, entre l’univers de l’artiste actuel et les maîtres Anciens. 

Joachim Patinir (1485-1524) Paysage avec Saint Christophe portant l’Enfant Jésus – Huile sur bois – 76,4×60 cm

L’exposition débute dans les salles consacrées au paysage dans l’art flamand. Une aquarelle lumineuse de grand format, “On the Ocean”, immenses vagues riches de nuances de noir et de blanc, est confrontée au célèbre panneau “Saint-Christophe portant l’Enfant Jésus”, attribué à Patinir (1475-1524), maître considéré comme l’inventeur de la peinture de paysage. Si le sujet religieux occupe le devant de la scène, le regard est furtivement attiré par le somptueux cliquetis des vagues.
Même procédé pour “Snow Landscape” confronté au paysage enneigé de Gijsbrecht Leytens (1586-1642), noir et blanc fondus pour l’un et subtil camaïeu pour l’autre. 

Hans Op de Beek – Vanitas XL – Sculpture – 2021 – 350x300x290 cm – Polyesther, polyuréthane, métal, polyamide, revêtement, dépôt de Hans Op de Beek

Une salle est consacrée à l’art du portrait. Les effigies des puissants de Flandre font face à des photos en noir et blanc d’enfants, visages impassibles aux yeux clos. Vanités et natures mortes, thématiques récurrentes dans l’art flamand ont inspiré à Hans Op de Beeck une Vanitas aux dimensions spectaculaires, avec crâne, chandelle, papillon et autres allusions au temps qui passe. 
“The Horseman”, sculpture de grandeur nature d’un cavalier énigmatique, serait l’évocation d’un voyageur solitaire traversant les siècles. Dans un coin, le visiteur rencontre une danseuse brésilienne au corps abandonné, affublée d’un costume et de bijoux rappelant le Carnaval de Rio. Claire allusion aux traditions carnavalesques du Nord, la couleur et la fureur en moins.

Hans Op de Beer – Sculpture, wood, polyester, metal, polyamide, coating – 2021 – 36×41×78 cm

En parallèle de ces spectaculaires représentations, la figure de l’enfance est joliment représentée, corps délicats jouant avec des bulles en verre, traités avec un réalisme extrême dans une teinte gris mat, comme s’ils étaient pétrifiés. Regard sur les “Espiègleries” de Nicolas Eekman, inspirées du personnage allemand Till l’Espiègle.

Enfin, Hans Op de Beeck rend hommage à la pratique des cabinets de curiosités, et plus encore à celui du musée, puisqu’il a intitulé sa “Wunderkammer” “Cassel”.

Jusqu’au 3 septembre 2023 – Musée départemental de Flandre – Cassel (59)

En Une : Hans op de Beek – Snow Landscape – Aquarelle sur papier – 2019 – 117x282x4,4 cm – Collection particulière dépôt de Hans Op de Beek