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On en parle

Les vibrations chinoises de Thomas Ruff

Christian Noorbergen, le 20 janvier 2021

La très grande et très belle récente galerie parisienne de David Zwirner présente une dense exposition des photographies de l’artiste allemand Thomas Ruff consacrées à la Chine, la première en France par la galerie.

Tableau chinois 04 – 2019 – ©Thomas Ruff/VG Bild Kunst, Bonn/Artists Rights Society (ARS) New York – Courtesy the artist and David Zwirner

Créant par somptueuses séries, ce photographe qui ne photographie pas mène une recherche approfondie sur divers genres photographiques, dont le portrait, le nu, le paysage ou la photographie d’architecture. Il recourt aussi bien à d’anciens procédés qu’aux technologies numériques les plus pointues, en passant par presque tous les procédés techniques intermédiaires.

Tableau chinois 11 – 2019 – ©Thomas Ruff/VG Bild Kunst, Bonn/Artists Rights Society (ARS) New York – Courtesy the artist and David Zwirner

Il part ici, dans ces salles superbement éclairées d’images de propagande chinoise. Les “tableaux chinois“, de Ruff sont nés de l’intérêt de longue date de l’artiste pour le genre de la photographie de propagande, qui représente une version idéologiquement orientée de la réalité et rentre intrinsèquement en conflit avec la capacité mimétique du médium. 

Tableau chinois 17 – 2019 – ©Thomas Ruff/VG Bild Kunst, Bonn/Artists Rights Society (ARS) New York – Courtesy the artist and David Zwirner

Captées, transformées et agrandies, ces images magnifiées gardent leur histoire, et l’œuvre finale, gardant presqu’intacte les traces des procédés utilisés, devient complexe, hétérogène et plurielle. Comme si la frontalité créée par Thomas Ruff s’appuyait, en insondable arrière-fond sur d’anciennes images toujours reliées à leur origine. En somme, de vibrants échos du passé cachés sous la claire apparence de l’œuvre finale.

Ce que crée l’artiste, c’est le sommet visible – ô combien – d’une archéologie d’images naguère fabriquées et enfouies. Une condensation sensible, fragile, forte et subtile. Sur le plan de l’impact plastique, Thomas Ruff est un maître.

Jusqu’au 6 mars 2021
Galerie David Zwirner – Paris 3ème