Si l’énergie créatrice capte d’emblée le regard, l’extrême subtilité chromatique et son aventureuse richesse graphique emporte très loin le mental. L’ouverture esthétique de Lydie Arickx est quasiment sans égale dans l’art de notre temps.
Les moyens artistiques d’Arickx, par l’œil et la main, sont prodigieux de puissance et de fluidité. Explosion arrêtée au bord de l’abîme, et c’est la matière qui surgit, qui crie, qui saigne et qui fait signe. Quelque chose de miraculeux se passe, qu’on appelle effet d’art. Il est, chez elle, grandiose et poignant. Lydie Arickx racle le fond de l’univers. Ivre d’exister enfin, la toile infinie se charge de vie, de beauté, de miracle et de matière. « La force dans la création est démultipliée, exutoire, surnaturelle, hors mesure » écrit-elle dans “d’Encre et d’Encore“, son dernier livre.
L’envers le plus profond du corps-univers : la peau la plus lointaine, voilà les vraies surfaces de l’art. C’est cela que montre l’artiste, le documentaire insensé, la scandaleuse cartographie des noces tragiques de l’être et du chaos, où la chair encore informe naît des prémices de la vie.
A la hauteur d’une des très grandes artistes de notre temps, le Château de Chambord et la grande Galerie Capazza, tout l’été, montrent les prodigieuses créations récentes de Lydie Arickx. L’étonnement et l’admiration ne suffisent pas à qualifier l’impact des pièces exposées. Émerveillement respectueux conviendrait davantage, ou encore sidération éblouie, devant la qualité et la quantité des œuvres, de la sculpture minimale à la peinture immense.
“Arborescences” illumine le Château de Chambord, et pas seulement dans quelques grandes salles superbement habitées, mais dans l’ensemble de l’immense bâtisse. On pourrait presque dire que le château tient le choc… On comprend aisément que plusieurs années de travail, pour l’artiste et ses proches, ont été nécessaires. Yannick Mercoyrol est le commissaire avisé de cette fabuleuse entreprise, laquelle a reçu le soutien de la Fondation Loo & Lou. Le livre-catalogue est riche de très grandes signatures, de Patrick Grainville à Marie Darrieussecq, d’Yves Michaux à Thierry Delcourt ou d’Olivier Kaeppelin à Allain Gillis.
A Nancay, dans la Galerie Capazza, l’une des plus belles de France, l’exposition consacrée à Lydie Arickx a pour excellent titre “La Vie Nue“, tant l’artiste cerne les surgissements vitaux dans leurs plus extrêmes expressions, parfois vastes jusqu’au grandiose, parfois ténues jusqu’à l’infime. Toujours en folle intensité.
Lydie Arickx la secouante arrache à vif les peaux mortes de l’art. Ses peintures, ses sculptures, ses dessins, et ses inventions constantes, sont admirables de dure présence et de vraie beauté crue.
Arborescences – Jusqu’au 17 octobre 2021
Château de Chambord – Chambord (41)
La vie nue – Jusqu’au 26 septembre 2021
Galerie Capazza – Nancay (18) – Lianescences – Jusqu’au 22 janvier 2022
Loo & Lou Gallery – Paris 3ème
En une : Grandeur nature – 292×415 cm ©Alex Bianchi
