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On en parle

Hélène Soète et ses bouteilles qui se parlent !

Gersende Petoux, le 11 décembre 2023

Le ton est donné, Hélène Soète évoque de suite ses bouteilles, mais pas n’importe lesquelles ! Des bouteilles qui se parlent, et entendent tout aussi ! “Dotées d’un côté corse, elles revendiquent leur indépendance”. Elles aiment vagabonder seules, mais s’acoquinent parfois, en couple, voire en bande.

En découvrant le travail de Jean Brisy, célèbre céramiste et l’un des fondateurs de l’Atelier de la Monnaie de Lille, Hélène tombe en amour sur une œuvre, une bouteille. D’autant plus fantasmée qu’elle ne put l’acquérir alors, celle-ci a hanté son imaginaire l’invitant par la suite à essayer de la rematérialiser. Quelques années plus tard, on lui parle d’un certain Morandi, pour elle encore inconnu, dont la complexité des objets rassemblés la fascine. Ses bouquets aussi, corolles de fleurs semblant dénuées de tiges, affleurant à la naissance des contenants, D’autres objets viennent peupler son univers : briques, cubes, boîtes sans couvercle…

Lampe d’Aladin

La lampe d’Aladin titille également son imagination !  Evanescence… Si au terme de trois vœux le bon génie est censé s’évanouir, est-il toujours dans la bouteille ? Au fil du temps, Hélène tend vers une lampe plus dépouillée, plus ronde, une lampe simplifiée. Elle s’amuse à préciser que le bon génie ne doit pas être loin au vu des parties lustrées brillantes à force d’être frottées !!!

Hélène Soète cuit ses céramiques au four dans un atelier hébergé à Fort de Mons près de Lille (ah, Vauban…). Elle y partage ses cuissons avec Annie Haquette (mais oui, Annie et ses poissons actuellement exposés à Bergues, l’actualité est riche !). Le travail de la céramiste est exigeant : “Je reviens 5 fois sur une bouteille ; à l’origine, une croûte, mise en forme autour d’un tube, autant dire que ça ne ressemble à rien ! Je me saisis alors de mes outils, je tape, j’enfonce, je creuse, j’écrase…”. La discrète et réservée Hélène soudain s’anime et montre avec un amusement non dissimulé des vidéos d’Annie et elle, cosmonautées et enfumées. Son humour “pince avec rire” fait écho à ces fameuses tenailles qu’elles utilisent pour extirper d’un four incandescent bouteilles, boîtes ou poissons avant de les refroidir dans l’eau.

Côté bouteilles, Hélène est intarissable : blanches, elles sont plus ou moins visibles, auréolées du contraste de leur ombre. Brunes, elles présentent des coulées de cendre. Cuites au bois, elles pleurent des larmes de fumée, stigmates des flammes qui les ont léchées. Parfois des touches d’émail donnent des reflets métalliques, “l’émail tressaille”, le Raku vient apposer ses craquelures. Aux côtés des bouteilles trônent le génie des lampes et des cocottes à la bouche toute tordue, comme celle de la voisine de son grand-père ! L’enfance refait surface, Hélène est une âme sensible et une artiste passionnée. 

“Les Cocottes”

Chez le galeriste Gilles Bouilliez à Roubaix, en ce nouvel opus intitulé “Des racines au ciel, la terre”, ses créations dialoguent avec les arbres tourmentés ou enchantés de Jean-Jacques Maho, en peintures et gravures. Douceur, poésie et romantisme sont au rendez-vous. Gilles aime montrer les artistes “du coin”, se perdre entre le jour et la nuit dans une atmosphère intime, élégante et feutrée. “On est dans la répétition certes, mais toutes ces bouteilles sont singulières”, ajoute Gilles qui mena de concert l’installation avec Hélène, une installation longue et exigeante pour un résultat magique. Avantage du lieu, l’élégance, la beauté et la luminosité du loft sont plus que jamais un écrin pour ces deux artistes merveilleux, unis avec harmonie en un véritable mariage artistique, une fusion esthétique.
Bravo à tous les trois ! Un rendez-vous à ne pas contourner pour “La Nuit des Arts de Roubaix” en ce mois de décembre 2023.

“Des racines au ciel la terre” – Jusqu’au 11 février 2024
La Teinturerie