Dominique d’Acher – Les chantiers organiques de l’inachevé
Christian Noorbergen, le 13 juillet 2022
Hors du commun, l’itinéraire artistique de Dominique d’Acher impressionne. Après une exposition présentée à Sens, le musée des Beaux-Arts de Dole propose un ensemble ouvert et vaste (une centaine d’œuvres) organisé de manière thématique.
Les années de jeunesse (1942-1964) constituent la trame de la première section qui ouvre l’exposition. A cette époque, l’artiste forme, avec Jean Criton, son compagnon, et Bernard Réquichot, un trio très créatif réfractaire à l’art installé du temps
Dominique d’Acher (1929-1991) est un brûlot de la création, à l’instar de Pierre Bettencourt ou de Louis Pons. Les grands manitous du regard, de Louis Délédicq à Claude Roffat, de Cérès Franco à Alain Jouffroy, l’ont observée de près et exposée.
« Les chantiers organiques de l’inachevé » sont organisés sous l’égide de Samuel Monier et de Jacques Py, dont on retrouve les fortes signatures dans le superbe catalogue. Les peintures achevées-inachevées de Dominique d’Acher, qui appréciait grandement Michaux, Fautrier et Wols, exorcisent une saisissante imagerie corporelle, hétérogène et fluide, un rien lunaire, à la fois réelle et fantasmée.
Chaque entité créée détruit la limite de l’enfermement, et s’ouvre à l’altérité qui fait vivre. Le geste dur et l’espace intime dominent : » Je dirige dans l’épaisseur le contenu du cercle. Dans le cercle, j’inscris des signes, une écriture, un message. Puis le cercle éclate, il n’y a plus que l’intérieur qui m’intéresse, le mouvement, la vie.«
Les œuvres déployées dans la seconde section témoignent du surgissement de figures embryonnaires, et de l’affirmation d’un langage plastique de plus en plus intériorisé et quasi viscéral. Aventures du dedans des corps. Une autre section met l’accent sur la difficile recherche d’une âpre quête identitaire où l’inconscient est toujours obsessionnellement sollicité. « Je conceptualise l’inconscient, ne cherche ni une logique visuelle, ni une logique plastique ». Une section finale, fascinante et déroutante, « voyage vers un mystérieux centre de gravité » aborde l’impossible de l’existence. Face-à-face avec l’absolu du réel qui englobe et enserre toute réalité humaine. Art des confins du pensable…
Née lacunaire, l’artiste affronte les abîmes du dedans. Comme sur un vertigineux toboggan, elle se jette dans l’ailleurs. Au fond des marécages archaïques. Dans le monde nocturne aqueux de l’origine. En éblouissantes profondeurs.
Dominique d’Acher décède d’une rupture d’anévrisme en 1991, lors du vernissage d’une exposition rétrospective qui lui était consacrée à la galerie Dorfmann-Roux, à Paris.
Jusqu’au 28 août 2022 – Musée des Beaux-Arts – Dole (39)
En Une : Sortir Rhizome – 1976-77 – 97×130 cm
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